"Usages
des images de la pornographie dans l'art"
Vincent Verlé, " Sexposition ", Le Petit Bulletin,
Grenoble, 11-19 mai 2004
Le 18 mai, le CNAC-Le Magasin organise la dernière séance
de son cycle de rencontres débats autour des usages artistiques
en invitant l'artiste Clarisse Hahn et l'historien d'art Paul Ardenne,
auteur d'un article référence sur l'utilisation des images
de la pornographie dans l'art.
En 1996, dans la revue Omnibus, Paul Ardenne
décortiquait l'image pornographique à un moment où
l'art contemporain usait massivement des figures de la sexualité.
Il s'employait à mettre à jour une esthétique de
la pornographie, pas si éloignée de l'imagerie artistique
dans sa construction méthodique, dans l'établissement de
codes. Il indiquait notamment que toute image ne saurait être pornographique
parce qu'elle montre une sexualité en acte, mais, à la fois,
que toute image pornographique était loin d'être une image
artistique, car lui manquaient souvent sens et discours revendicatif.
Ces dernières années, le rapport des artistes au sexe a
largement évolué. On est en effet passé d'une représentation
sulfureuse qui questionnait la transgression des interdits à un
rapport beaucoup plus banalisé avec l'image de la sexualité.
La levée des interdits a fait du sexe un objet culturel transitionnel
au sujet duquel s'est établi un certain consensus. Et si le sexe
reste vendeur (il suffit pour cela de voir le nombre d'ouvrages d'art
consacrés à ce sujet dont la portée analytique reste
assez faible selon Paul Ardenne) il n'en a pas moins été
dépassé dans la réflexion artistique par d'autres
interrogations, notamment celle de la question de l'identité des
genres.
Les nouvelles transgressions
Aujourd'hui, la dominance de la norme hétérosexuelle, encore
très prégnante, semble battue en brèche par des pratiques
transgenres, certes encore anecdotiques, mais bien présentes. Et
c'est par une mise à distance de l'intime que passe ce nouveau
questionnement de l'interdit sexuel. La transgression ne se fait plus
par la représentation de l'acte sexué, mais bien par celles
des pratiques dites déviantes. Pour appuyer ce propos, une vidéo
de Clarisse Hahn sera diffusée ce lundi 17 mai à 16h et
le lendemain juste avant la rencontre. Jeune artiste française,
Clarisse Hahn questionne le corps jusqu'à ses extrêmes limites
tout en mettant en lumière ce qui échappe à toute
règle : l'humanité de l'autre. Dans Karima, la
vidéo qu'elle présentera lors du débat, elle donne
la parole à une jeune femme qu'elle montre dans sa vie quotidienne
et dans sa sexualité dominatrice. Elle met ainsi en abîme
la représentation traditionnelle du sexe à travers une pratique
extrême, le tout filmé sous l'égide d'une réalité
quotidienne. Et c'est bien tout le propos des interrogations qui seront
soulevées lors de cette rencontre débat. Ou comment les
artistes intègrent les nouvelles sexualités dans leur rapport
au monde.
Vincent Verlé
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