Press release (french)

Jef Geys
«De passerelle en passerelle»
26 février – 21 mai 1989

Jef Geys, né en 1934, vit à Balen, Belgique, où il enseigne à l'école maternelle.

Jef Geys, depuis le début de ses activités artistiques dans les années 60, est un artiste difficile à définir. En effet, aucun des mots génériques de l'art contemporain ne convient (sculpteur, peintre, photographe, installateur, vidéaste, performeur...). Il faudrait en créer d'autres, qui donneraient une idée du ton, sans décrire, du fond plutôt que de la forme. On dit parfois de lui qu'il est un artiste "engagé", on pourrait dire qu'il est un "perturbateur", ou un "révélateur".

Jef Geys, tout au long de son oeuvre, s'attaque de façon indirecte aux supercheries sociales. Il s'en fait d'abord le complice pour ensuite les saboter (une protestation ne peut se concrétiser qu'à l'intérieur d'un système). Sans naïveté, avec ingénuité et brutalité, il nous interroge : Ceux qui disposent d'un certain pouvoir, qu'essaient-ils de faire accroire à "l'homme de la rue", qu'essaient-ils de lui faire oublier ?

Le projet de Jef Geys au Magasin se situe dans la continuité des 243 oeuvres précédentes, et maintient cette position idéologique. Cet artiste, ne considérant ni son statut, ni son travail comme "allant de soi", est amené à examiner avec un soin particulier chaque situation nouvelle. Lors de son premier séjour à Grenoble, Jef Geys a soigneusement étudié l'histoire et l'actualité de l'usine Bouchayer-Viallet (le Magasin) et de son environnement : le quartier Berriat et l'autre rive du Drac (rivière qui passe derrière le Magasin). Il a pris des photographies, recueilli des interviews, constaté que le quartier conservait une mémoire assez vive de l'usine antérieure au Magasin, plus vive que ne l'est encore la conscience de sa vocation actuelle.

Cette accumulation de données sur l'histoire du Magasin et de son quartier a fondé le projet de Jef Geys pour la "Rue" du Magasin :

Sur les deux rails porteurs qui courent, à hauteur des vitrages (15 m du sol), tout au long des murs intérieurs de la halle, on installe deux passerelles qui permettent au public, en empruntant les ponts roulants aux deux extrémités, de faire le tour de l'intérieur du Magasin. L'accès aux passerelles se fait par les deux escaliers qui mènent aux bureaux du Centre : l'un de forme angulaire est prolongé jusqu'aux passerelles par un escalier en colimaçon, l'autre, en colimaçon, est prolongé par un escalier de forme angulaire.

Grâce à l'installation de ces passerelles, les visiteurs auraient pu découvrir, dans des perspectives multiples et inhabituelles, l'espace d'exposition en tant que tel, d'une part, d'autre part ses alentours : le site Bouchayer-Viallet, le quartier Berriat, l'autre rive du Drac, avec en particulier un immeuble des années 60 duquel on a une belle vue sur le Magasin.

Pour des raisons de sécurité, ce projet ne peut être réalisé. De l'oeuvre n° 244, on verra donc

- L'espace d'exposition (la "Rue") vide,

- Dans l'auditorium, une documentation sur le projet : photographies, notes, maquettes (il s'agit d'une présentation, et non d'une exposition).

- Un numéro du "Kempens Informatieblad" entièrement consacré au projet (Geys publie un journal, le "Kempens Informatieblad", à l'occasion de chacune de ses expositions).

- Deux cartes postales et une affiche représentant le Magasin photographié de l'immeuble "60" sur l'autre rive du Drac, et l'immeuble vu du Magasin.

- Le jour du vernissage, à 17h, une discussion publique sur le thème "le lieu d'exposition après l'avant-garde" rassemblera des architectes et des organisateurs d'exposition, en présence de Jef Geys.

L'enregistrement vidéo de cette discussion viendra s'ajouter à la documentation présentée dans l'auditorium. Sa transcription sera ensuite publiée en supplément au numéro du "Kempens Informatieblad".

- Le projet conserve son titre initial : "De passerelle en passerelle".

Ainsi, le titre "De passerelle en passerelle", renvoie au passage d'une rive à l'autre du Drac par le pont dont la construction fut capitale pour l'évolution du quartier Berriat ; au passage également de l'extérieur à l'intérieur du Magasin (ou l'inverse), ou encore à celui de l'espace des salles d'exposition symbolisant les espaces d'exposition traditionnels, à la "Rue" du Magasin dont on ne sait si elle est ouverte ou fermée, intérieur ou extérieur, symbolisant les nouveaux espaces possibles pour l'art.