LA QUESTION
Dispositif vidéo, discussions, performances
Commissaire : Stéphanie Moisdon Trembley
6, 7 et 8 février 2003
Mise en lumière
Marten Spangberg et Tor Lindstrand
L'approche critique de la fin des années 80 a voulu que le débat
sur la spécificité du médium soit escamoté
au profit d'un étalage de recherches plus ou moins primitives autour
des principes de transversalité, de déplacement et autres
déterritorialisations.
Cette attitude héritée des lectures obliques de Deleuze et Guattari,
s'appuyant en partie sur la politique des multitudes, n'a finalement produit
qu'un autre vide ontologique, rien moins qu'un nouveau standard, celui du "et"
en lieu du "ou" et du "encore", un autre système
de valeur, de communication, de sectorisation des pratiques artistiques et curatoriales.
Cette défection de la pensée sur le médium comme
sur les catégories de l'art nous porte aujourd'hui à reconsidérer
les contextes dans lesquels nous continuons néanmoins d'intervenir
et à repenser l'usage spécifique que nous faisons de l'art
comme moment, de la technologie comme instance.
Cette invitation du Magasin à créer un espace à la
fois discursif et spectaculaire autour de la vidéo incite à
poser autrement la question du médium, non pas à travers
ses cadastres, mais dans ses relations avec la production d'images, de
réalités, d'événements, de commentaires. LA
QUESTION ici est donc celle du langage, du temps effectif pour voir, monter,
enregistrer, traduire ou encore tromper l'ennui inévitablement
compris dans cette somme exponentielle de mouvements déjà
programmés, déjà projetés.
Question qui s'inscrit par ailleurs dans un espace transitionnel où
les agencements et les méthodes d'exposition de la vidéo
semblent s'épuiser à chaque tentative. Au-delà du
seul répertoire de dispositifs disponibles -multi-écrans,
volumes plats, emboîtement, effets de vrille ou de contours, de
dislocation-, entre le blanc trop brillant et le noir jamais suffisant,
l'effort consiste non pas à rendre visible l'image telle qu'elle
est mais sa machinerie, son présent, l'espace et l'époque
d'où elle vient.
Le parcours créé pour le Magasin implique une sélection
de vidéos qui ont toutes à voir avec ce lieu commun de l'absolue
"contemporanéité" et qui s'articule autour du
seul critère de la persistance : ce qui me vient, ce qui me reste,
ce qui me résiste.
Montrées à travers un double dispositif de projection et
de fragmentation, le jeu consiste ici à désigner un écart
entre les formes de la communication et celles de l'art, à montrer
un passage entre l'unique (la projection) et le dissocié (l'échantillonnage),
entre la production d'objet et la production de soi.
A travers une série de conversations, différents intervenants,
artistes, commissaires, critiques viennent directement prendre place dans
ce dispositif, sorte de temps radiophonique-télévisuel qui
interrompt et réinitialise à la fois le déroulement
des images et qui génère des formes potentielles de scripts,
d'histoires et de commentaires.
Le travail de mise en lumière, conçu par Marten Spangberg
et Tor Lindstrand, émane de leur recherche sur la représentation
virtuelle, l'animation en 3D d'espaces architecturaux et théâtraux.
En rapport avec la performance et plus particulièrement avec les
différentes stratégies chorégraphiques, leur approche
consiste ici à positionner le spectateur dans un espace performatif,
à l'inclure dans un événement qui produit un espace-temps
spécifique lié aux composants de la vidéo comme à
ses dispositifs.
Stéphanie Moisdon Trembley