Images transgenres
Vincent Verlé
"jeux de genres"
Le Petit Bulletin, Grenoble, 19-26 février 2003, P. 4
Où en est la photographie aujourd'hui? Autour
du critique d'art Pascal Beausse, une dizaine d'artistes, critiques et commissaires
d'exposition vont débattre de la question les 21 et 22 février
au CNAC-Magasin, au travers de dialogues croisés et de présentations
de leurs travaux.
Aujourd'hui, la génération d'artistes qui travaille autour du
médium de la photographie doit composer avec les normes photographiques
imposées par leurs aînés, normes qui peuvent être
considérées d'un certain point de vue comme figées dans
leurs représentations stylistiques. C'est à ces artistes trentenaires
que s'intéresse Pascal Beausse, et notamment à leur travail sur
la représentation du réel.
Comment peut-on encore représenter le monde aujourd'hui ? Comment un
artiste travaillant le médium photo se positionne-t-il aujourd'hui par
rapport à un régime de représentation majoritairement dominé
par les médias ? Cette question centrale de la représentation
du monde sera traitée selon deux approches, différentes et pourtant
quelque peu semblables. Dans un premier temps, à travers non pas le renouvellement,
mais la mutation des genres photographiques, ou comment se jouer de ces derniers.
De l'un à l'autre
Le travail de Guillaume Janot mixe différents styles, allant du portrait
au paysage, et propose des formes légères au contenu métaphysique,
où il interroge la notion même de styles. En proposant un panorama
de lieux chargés d'histoire, son travail questionne la représentation
et l'interprétation. Le groupe Ohio s'inscrit, quant à lui, plus
radicalement dans le refus des positions de genres. Toute image, tout support
d'exposition est acceptable. Qu'en devient-il de la photographie? Bruno Serralongue
propose dans son travail un regard non journalistique de l'actualité.
En devenant stagiaire du réel, il crée des images génériques
constamment actuelles d'un événement. Gianni Motti, de son côté,
utilise les médias, retraite leurs images, fait bégayer l'information
afin de représenter ce qui n'est jamais montré. C'est aussi l'intérêt
de Pierre Faure, mais à un autre niveau, celui de la quotidienneté.
Dans un monde saturé d'objet, il s'intéresse à la façon
qu'ont les individus d'habiter le monde, tout comme Philippe Durand qui, par
le biais d'une liaison poétique/politique, donne à voir l'inframince
du monde qui nous entoure. À travers la présentation de leurs
travaux, et des problématiques qui les sous-tendent, de discussions tous
azimuts, c'est surtout la question de la justesse du champ de l'art aujourd'hui
qui sera posée. Ou comment en repousser encore un peu plus les limites...
Vincent Verlé