Lidwien van de Ven utilise la photographie depuis 1985 et le film depuis
1995. Elle explore la frontière entre la réalité
et ses images, et s’intéresse tout particulièrement
aux lois qui gouvernent la figuration dans la politique et la religion.
Elle voyage à travers le monde - elle partage en effet très
souvent, les mêmes lieux d’investigation que les journalistes
- et enquête sur les questions qui touchent à la notion de
représentation, sur ce qui est photographiable, visible, identifiable.
Alors que l’on pourait être tenté de placer son travail
dans le champ du documentaire ou du photo-reportage, elle insiste sur
le fait que c’est le circuit artistique qui lui offre le temps et
les conditions nécessaires pour produire et montrer ses images.
Hors du flux de l’actualité, Lidwien van de Ven cherche à
élaborer un langage au sein duquel les éléments visuels
et les contenus peuvent être équivalents, tout en prenant
en compte les contraintes techniques imposées par le médium
utilisé.
La photographie lui permet de produire ses œuvres dans des formats
et supports d’édition différents. Pour plusieurs d’entre
elles, comme c’est le cas pour les cinq qui sont montrées
au MAGASIN, elle a repris (approximativement) le format standard des panneaux
publicitaires 4 x 3 mètres, imprimées en off-set, et ainsi
joué de la forme de représentation dans l’espace public
la plus codée et la plus répandue.
La disposition de ses photographies dans l’espace d’exposition
est également de toute première importance; elle tient compte
des relations visuelle et textuelle qui se créent entre elles.
Une même image peut fonctionner dans plusieurs expositions, avec
un sens différent. De façon significative, elle a choisi
ici de montrer des photographies prises en Europe à la fin du millénaire
: cinq images différentes du monde contemporain.
Marche Blanche (2001) 300 x 390 cm
OTAN/BXL., 19 avril 1999 (2001) 386 x 300 cm
Sans titre (2001) 245 x 356 cm
Eclipse de lune (2001) 280 x 332 cm
Reichtag (2001) 300 x 425 cm
Marche Blanche et OTAN désignent des situations
bien précises de l’actualité récente : la «marche
blanche», grande manifestation contre la pédophilie en Belgique,
et les camions satellites des médias devant le siège de
l’OTAN. Mais en même temps, elles acquièrent un statut
métonymique, en valant comme synthèse possible d’un
ordre du monde tel que pensé par le monde de la communication :
d’un côté la fabrique de l’information par des
professionnels, et de l’autre le mode collectif d’expression
publique des citoyens anonymes.
Sans titre, 2001, montre un jeune homme qui dort à même
le sol, ses chaussures soigneusement posées à ses côtés,
la tête reposant sur un livre. L’état de sommeil a
souvent été examiné par Lidwien van de Ven. Cet état
où chacun est vulnérable, présent sans l’être,
capable d’accéder à d’autres mondes par le rêve
rejoint aussi le questionnement de l’artiste sur le visible et l’invisible,
sur l’écart entre ce que montrent les images et ce qui est
vu par le spectateur, que l’on retrouve aussi dans Eclipse de
Lune, 2001.
Enfin, Reichtag nous montre l’édifice du parlement
allemand d’un point de vue frontal, en cours de restauration, à
la fois matériellement et symboliquement pour le peuple allemand
réunifié.
Les images de Lidwien van de Ven permettent de multiples lectures, et
confèrent au spectateur un rôle crucial (celui de prolonger
l’histoire des images en fonction de son propre vécu) : une
exploration de la substance de la communication.
Lidwien van de Ven
Née en 1963 à Hulst, Pays Bas.