Kader Attia, Tsunami
«Meese, la fureur de vivre»
L'Oeil, Paris,
Novembre 2006,
p.65
Peintre, sculpteur, performer et auteur d'envahissantes installations, Jonathan
Meese s'est imposé au cours des cinq dernières années
comme l'un des artistes les plus prospectifs de la scène internationale.
Dans une tradition très germanique, dont Anselm Kiefer était
jusqu'alors le meilleur représentant, il tente par tous les moyens
de reconstruire un mythe allemand tout en s'acharnant à le détruire. À quatre
ou à six mains, parfois, avec Jörg Immendorf et Albert Oehlen.
Entre un amour forcené de la peinture et une violence du geste qui la
met en pièces, ce Berlinois de 35 ans développe un art cultivé qui
se repaît de modèles extrêmes, tels Saint-Just et Nietzsche.
Mêlant avec l'énergie d'un puncheur le privé et l'universel,
le trivial et le philosophique, Meese use de tous les moyens plastiques dans
une sorte de fureur de vivre et une urgence qui font éclater toutes
les conventions et toutes les hiérarchies.
Il peint à grands coups de brosse rageurs, il colle à même
la peinture toutes sortes d'objets, il y inscrit des mots, des phrases manifestes.
On n'en sort pas indemne. Il y a là une force, et la peinture y gagne
une vitalité qu'on ne lui avait pas vue depuis longtemps. De ce point
de vue, la monographie que lui consacre le Magasin de Grenoble ne manque pas
de souffle.
Philippe Piguet