Moment Ginza


 

"ambiance urbaine au Magasin"
Libération, Paris, 13 août 1997, p. 22

La proposition de l'artiste Dominique Gonzalez-Foerster (née en 1965) au Magasin de Grenoble n'a rien d'une exposition traditionnelle et tient plutôt d'une version plastique de l'ambient en musique. Ou mieux, de ce qu'on appelle aujourd'hui, toujours dans le champ musical, l'easy listening, dont les productions des artistes seraient, en quelque sorte, les plages sonores.
Mais peut-être est-ce le thème même qui incite à ce type de rapprochement. Le Moment Ginza invite en effet à imaginer, plutôt qu'à reconstituer, un espace et un temps à la fois précis (le dimanche après-midi à Ginza, les Champs-Elysées de Tokyo, fermé aux voitures) et néanmoins lointain. Reservé également au piéton, le vaste espace du centre d'art de Grenoble est ainsi transformé en bribes d'animation urbaine, suivant des scénarios empruntés, non à la ville réelle, mais à ce que les artistes en font dans leur travail propre. Usage de la signalétique, murs d'images vidéos (Anne Frémy et Ange Leccia), référence au cinéma (Pierre Huyghe), au panneau d'affichage (Maurizio Cattelan) aux lumières (Angela Bulloch), ou à la conversation (Philippe Parreno).
Mais l'exposition ne tiendrait pas sans une colonne vertébrale aussi fragile que nécessaire dans un environnement un peu high-tech : un tortillon multicolore, oeuvre tricotée par les artistes Vidya et Jean Michel (entre 1994 et 1996 !) qui pendouille sur toute la longueur de l'espace alloué à ce Moment Ginza comme une sorte de câble électrique, lien et vecteur de communication.

Elisabeth Lebovici