Sol Lewitt


 

Jacques Guillot
"Sol LeWitt: « Wall Drawings » au Magasin"
Galeries magazine, Paris, août/septembre 1986, n°14, p.97

« Diagonale pour un lieu ». C'est aujourd'hui le tour de Sol LeWitt avec « Pyramids ».
J'ai toujours ressenti une émotion très forte devant une oeuvre de Sol LeWitt, c'est un travail avec lequel je communique instantanément. Si Sol LeWitt est le « père » de l'art conceptuel, ce n'est pas réduire son exigence artistique que de parler de son art en terme d'émotion; lui-même d'ailleurs reconnaît oeuvrer dans ce sens. Ses récents travaux, et en particulier le Wall Drawing réalisé au Magasin, s'inscrivent dans une dimension sensuelle et émotionnelle qui peut évoquer la tradition italienne de la peinture à fresque. Sol LeWitt passe d'ailleurs une grande partie de son temps à Spoletto, près d'Assises, et ne craint pas de se référer à Giotto.
La réalisation de cette oeuvre a été pour moi et, je crois, pour toute l'équipe du Centre, une aventure formidable: par le caractère exceptionnel de l'oeuvre elle-même; c'est l'un des plus grands Wall Drawings que Sol LeWitt ait réalisé: six Wall Drawings ont été réalisés à l'encre indienne; il y a huit couches superposées apposées au chiffon. La surface est d'environ 200 mètres de long sur 5,50m de haut; par le côté spectaculaire de sa mise en chantier, mais aussi par la qualité des personnes impliquées dans ce travail: Sol lui-même qui a fait preuve d'une réelle générosité en acceptant dans un délai très bref de venir à Grenoble, les assistants: David de New York, Roy, Marien et Franzje d'Amsterdam, et les trois étudiants des Beaux-Arts de Grenoble qui les ont aidé.
Nous avons, en fait, proposé à Sol LeWitt la seule chose qu'il demande à une institution: « de l'espace et du temps ». Il nous a offert en retour une expérience et une oeuvre exceptionnelles.
Parallèlement aux Wall Drawings, nous présentons dans l'espace « intérieur » le travail de Ken Lum et de General Idea, artistes conceptuels de la « 3e génération ».
Les relations évidentes entre les deux espaces, « intérieur » et « extérieur », la rencontre des oeuvres de Ken Lum, General Idea et Sol LeWitt démontrent, il me semble, l'existence d'une dialectique forte et prometteuse d'avenir, entre les deux lieux d'expositions.