«Chris optique et Mickey House»
Numéro, Paris, août 2000, p. 36
Pourquoi les barreaux de chaise en photo forment-ils toujours un parallélépipède
? Pourquoi les couleurs Fuji foncent-elles à la machine à laver
? Pourquoi y a-t-il toujours des garçons de café dans l'axe de
l'Arc de triomphe sur les photos de Paris ? Depuis vingt ans, Christopher
Williams interroge les clichés au sens large et en tout genre.
Des préjugés académiques sur la "bonne photo"
à la représentation ethnocentrique d'autres cultures, l'artiste
californien démonte les références picturales du modernisme
en travaillant à partir de photos d'archives : macroplans de coléoptères
les quatre fers en l'air en noir et blanc glamour version studio, quartier chinois
sans Chinois à Cuba, esthétisme son et lumière de Chinatown
à Los Angeles…
S'il ne vient pas de L.A. mais de Chicago (il vit aujourd'hui à New York),
Michael Smith compte parmi ses admirateurs le master of art
californien Mike Kelley. Artiste de performances avant tout, mais aussi d'installations
ou de vidéos, il revendique un registre tragicomique dans la lignée
ironico-kamikaze d'Andy Kaufman. Depuis vingt ans également, Smith fait
vivre un personnage fictif, Mike, contre-exemple quintessentiel de l'american
dream. Tour à tour artiste, vendeur de luminaires pour boîtes
de nuit, citoyen modèle reclu dans un abri antiatomique en pleine campagne
verdoyante, Mike se débat dans la société de consommation
comme dans des sables mouvants et fait de son mieux pour être un winner.
En vain. Sa diction légumière, ses efforts pour rentrer dans ses
vieux vêtements disco, danser comme Travolta et convaincre que son dépôt
de bilan est un succès, sa surprise-partie en tête à tête
avec sa boule lumineuse... Mike est pathétique, emphatique, grotesque,
hilarant et, donc, attachant.
Véronique Dupont