Aimer, travailler, exister: propositions communautaires
dans l'après-l968
"Aimer, travailler, exister"
Le Dauphiné Libéré, 22 juillet 2004, p. 8
Privé d'exposition pour cause de travaux le Magasin, Centre National
d'Art Contemporain de Grenoble, s'offre une escapade en Suisse.
Le déménagement pour cause de rénovation de la verrière
n'aura lieu qu'en octobre mais le Magasin se déploie dorénavant
hors les murs... Avant l'exposition prévue à la rentrée
dans l'ancien musée de peinture, il a pris la direction du musée
d'art moderne et contemporain de Genève pour « aimer, travailler,
exister ». Une exposition qui met en lumière diverses propositions
communautaires de l'après 1968 et s'insère dans le dernier épisode
du cycle du Mamco, « rien ne presse », épisode comprenant
dix autres expositions sous le titre « e la nave va ».
La présence du Magasin au Mamco installé depuis dix ans lui aussi
au coeur de la ville dans une ancienne usine (la comparaison s'arrête
là) s'explique à la fois par l'amitié qui lie Christian
Bernard et Yves Aupetitallot, les directeurs de chacun des espaces, mais aussi
par une programmation qui fait parfois appel aux mêmes artistes. Ainsi
John Miller, dont on a découvert le travail au Magasin et dont les photographies
sont actuellement présentées au musée.
Pour cette plongée dans l'histoire, récente, de l'art un important
travail de recherche a été réalisé. Une soixantaine
d'oeuvres et de documents a été rassemblée. Deux axes ont
été privilégiés, la scène artistique anversoise
et celle de l'Amérique, du nord et du sud. Le titre de l'exposition a
été emprunté à Jörg Immendorff que l'on retrouve
ici avec Lidl, un concept original qu'il a décliné dans divers
domaines. Match de foot, course de vélo, on le suit par photographies
interposées. Car comment matérialiser des manifestations forcément
éphémères...
Ainsi pour le « Moon landing breakfast » qui a rassemblé
en 1969 les artistes d'Anvers autour de l'alunissage ou pour « Food »,
ce restaurant créé à Soho par Gordon Matta-Clark qui offrait
nourritures terrestres et spirituelles. On retrouve cette idée de repas
communautaire avec « The dinner party » de Judy Chicago. Elle avait
fait appel à une communauté de femmes pour en réaliser
les 39 couverts. Un travail impressionnant...
L'exposition présente aussi différentes formes de vêtements
collectifs. Et, on le constate, l'art mène à tout, notamment à
la psychanalyse, quand, avec Lygia Clark, il devient thérapie.
Sylvie PERRARD