Annika Larsson, Amy O'Neill, Tracey Emin
"Corso fleuri, expo d'Amy" (Amy O'Neill)
Les Affiches, Grenoble, 18 mars 2005, p.143
Ne manquent que les effluves de hot dogs et de frites. Sur un fond sonore de
fanfare rock, une flopée de réminiscences - carnavals et corsos
- tout droit ressuscitées de nos jeunes années nous saisit soudain.
De grandes compositions de fleurs en papier et en matière plastique,
mi-diadèmes jetables mi-couronnes mortuaires, voisinent avec trois dessins
monumentaux (vastes esquisses à la mine de plomb rehaussées au
crayon de couleur rose) représentant des chars de parade: une baleine,
une paire de bottes de cow-boy et le trône de la reine et de ses dauphines
- grand bouquet de jeunes filles en fleurs et de roses en boutons d'acné
juvénile.
On ne sera guère surpris d'apprendre qu'Amy O'NEILL travaille depuis
l'an passé sur un projet de cimetière de chars de parade. La jeune
artiste américaine puise en effet dans la culture ultra-populaire de
son pays natal, pour composer une oeuvre où l'humour le dispute à
la tendresse. Le kitch et l'artifice à deux sous triomphent dans cette
installation, qui, en dépit de son mauvais goût affiché,
touche au coeur, parce que chacun y retrouvera un parfum de son enfance - vélos
fleuris, défilé costumé, fête foraine, élection
de la rosière et flonflons. Du coup, si l'on sourit assurément
à la découverte de cette exposition, on admettra toutefois que,
dans la composition de ce sourire, entre pas mal d'émotion.
Jean-Louis Roux