Oops

 

«Quand l’art optique fait “Oops” »
L’Hebdo, Lausanne, 5 novembre 1998, p. 137

A Lausanne, on découvre que les illusions d'optique conservent leur mystère et leurs adeptes. Un vertige stimulant.

Qui se souvient encore de l'op'art (ou art optique) et de l'art cinétique qui firent les délices des années 60 ? Ses créateurs restent pourtant très proches des plasticiens actuels dans leur façon d'inviter le public à réfléchir sur ses propres perceptions. Une parenté soulignée l'été dernier à Grenoble par deux présentations conjointes : une rétrospective consacrée au GRAV (Groupe de recherche d'art visuel, 1960-1968, auquel appartenait notamment François Morellet) et l'exposition «Oops», centrée sur des démarches actuelles et conçue par le Suisse Lionel Bovier.

«Oops» a fait le voyage de retour avec son commissaire. Les Lausannois la découvriront toutefois dans une version légèrement réaménagée réunissant autour de travaux récents de John Armleder, Francis Baudevin, Michael Scott et John Tremblay, des pièces des années 60 de Julio Le Parc (qui fit partie du GRAV), Robert Breer et Dadamaino. Si le petit catalogue rebute un peu par son ton universitaire, la confrontation avec les oeuvres est un régal. Rien de plus ludique, en effet, que ces pièces qui relèvent de l'illusion, de l'intangible, d'une géométrie revisitée par le virtuel. Aux murs, les fines lignes des tableaux de Michael Scott irritent autant qu'ils attirent par leurs contrastes, leurs décalages, leurs vibrations. Sur le sol, la grande cible étirée de John Tremblay se déploie tel un vélodrome noir et blanc. Le regard tangue, la tête tourne, les plans se dérobent, les volumes jouent l'incertitude. Fasciné par les reflets des demi-dômes miroités de John Armleder - un clin d'oeil à ses propres tableaux à pois - le visiteur doit prendre garde à ne pas marcher sur «Rug», la couverture animée de Robert Breer. Soucieuse de «remettre en jeu des vocabulaires, des problématiques et des enjeux historiques à partir d'aujourd'hui», «Oops» se préoccupe plus des similitudes que des différences. Vu le nombre de pièces limité, il est donc parfois difficile de replacer chacun dans son époque et sa problématique.

Mireille Decombes