Le Procès de Pol Pot

 

«..., a, b, c, ... d'un projet, d'un procès»
Divers Cités (supp. Culture), Grenoble, décembre 1998, p. 4-5

A.
Le vingtième siècle n'a pas été avare d'événements tragiques ayant suscité nombre de questionnements pour très peu de réponses valables et confirmées.

L'histoire démoniaco-entropique du Cambodge et le régime des Khmers rouges de Polpot, qui souvent ont fait la une des médias, deviennent des sujets de démarche d'artistes contemporains. Hasard, concours de circonstances, peut être simples manoeuvres artistiques ?

Depuis le 7 novembre, au Magasin (Centre National d'Art Contemporain de Grenoble), Liam Gillick et Philippe Parreno, en association avec d'autres artistes proposent leur version «du procès Polpot». Réel et énigmatique (du fait du manque d'informations concrètes et complètes), prétexte à un projet d'exposition. A leur, manière, ils essaient de pointer le malaise toujours persistant dans nos sociétés : quant à la genèse de ce mal absolu que représente le totalitarisme. A tel point que l'on pourrait en venir à se poser la question de l'utilité de ce type de démarche compte tenu des résultats pitoyables engendrés par ce type de système politique.

 

B. «Entropie» et «logos»

Quelle est la conception choisie par les artistes ? Durant le processus de préparation de l'exposition, ils échangent des opinions (par internet le plus souvent), et se consultent mutuellement sur l'idée du projet. Le choix est étonnement simple. C'est celui d'un texte omniprésent, d'une langue et d'un alphabet fait de signes. De signes «considérés par le philosophe comme le moyen de la communication humaine». Lettres, chiffres et le texte, signifiant symbolique, construit et déconstruit, devient philosophie... Traductions et constatations, questions, «entropie énigmatique» du procès de Polpot, «logos» textuel constituent le choix des recherches et de la discussion (sur les murs et via internet) l'écrit nous mène à encore plus d'écrit et de plus en plus encore. Comme l'Histoire ne nous mène pas à la connaissance absolue ou à une lutte évidente, mais nous conduit plutôt à plus d'Histoire, encore et toujours plus. Les textes commentent d'autres textes et nous devrions cesser de contrôler ces textes par leur véracité... «Le textualisme sort d'une assertion : que tous les problèmes, thèmes et discernements sont dépendants de la langue et qu'ils sont la résultante du choix d'un vocabulaire permettant un jeu de mots». En l'espace des quelques jours précédant l'ouverture de l'exposition, la topographie de la galerie, des couloirs et de la Rue du Magasin, s'est transformée en typographie symbolique de l'espace d'un livre ouvert. Finalement, les textes (noirs) choisis par les auteurs collent sur le mur (blanc) et horizontalement, verticalement, tentent de remplir l'espace.

 

C. «... Jusqu'à quel point sera-t-il nécessaire de juger l'efficacité des solutions proposées ? ...»

 

C'est l'une des questions posées sur le mur : sans doute la plus importante ! La contraction de simples mots, de chiffres, quelques questions «graves-brèves» créent la "GRAPHIlosophie" : une sphère de commentaires très personnels. Le plus difficile pour le spectateur-observateur-public, c'est de distinguer le «texte» du livre fermé dans la couverture. La transformation des signes ainsi que sa durée, peuvent créer un inconfort de la perception du sens systématiquement occulté. L exposition proposée par le Magasin ne nous agace pas par la multiplicité de signes complexes, ce qui ne veut pas dire pour autant que dans sa simplicité, elle soit facile à comprendre pour le spectateur. A voir et juger par nécessité jusqu'à fin décembre.

Jaroslaw T.Klos