Réouverture du MAGASIN
Le Magasin de Grenoble,
Archistorm, Paris, Mars-Avril 2006
LE MAGASIN de Grenoble
Après des mois de chantier, le 21 janvier dernier a marqué la
réouverture du magasin a grenoble, structure emblématique du
paysage artistique.
EMBLEME ARTISTIQUE
Ancré dans le tissu urbain, le Centre National d'Art Contemporain Le
Magasin participe de l'irrigation du territoire en matière d'arts plastiques.
Préfiguré en 1977 par Pierre Gaudibert, lancé par Jacques
Guillot et ses ambitions internationales, il est piloté par AdelinaVon
Fürstenberg et sa programmation pointue. Depuis 1996, c'est Yves Aupetitallot,
son directeur actuel, qui y développe un centre d'art référencé bien
au-delà de nos frontières.
Issu de l'ère décentralisée
Fort d'une histoire singulière, durant l'ère Mitterrandiste «des
grands travaux» et «l'époque Lang» enclines à la
création d'un réseau d'instances artistiques de production, de
monstration et de diffusion, Le Magasin est une réponse à l'évidente
adaptation du schéma politique à un essaimage de l'art actuel à l'échelle
nationale et internationale. Fruit de la «politique culturelle décentralisée»,
c'est un des premiers lieux d'art à vocation européenne hébergé au
sein de friches industrielles, fondement de son identité architecturale.
Une réhabilitation confiée à Patrick Bouchain
Créée par les ateliers Eiffel, acquise par des industriels (Bouchayer et Viallet) et délocalisée à Grenoble, cette halle est réhabilitée dès 1985 par Patrick Bouchain qui permute ce corpus en espace artistique, gardant cette peau métallique et vitrée et adaptant les surfaces à l'activité allouée (travail, expositions...). Emane un zonage de l'aire d'exposition segmentée entre «les galeries» (un espace modulable de 870 m2 appropriable par quelque démarche artistique) et «la rue» (périmètre sous verrière, long de 70 m et haut de 20 m, étalé sur 900 m2 où créations in situ sont pressenties), sur une aire globale de 3000 m2 dont 75 % dévolu à l'exposition.
Un chantier impulsé par la collectivité
A sa nomination, Yves Aupetitallot récupère pourtant un site
abîmé dont une verrière de 1600 m2, perméable. Dès
2004, la municipalité (propriétaire du lieu) engage une rénovation
avec en priorité la réfection de la charpente et des surfaces
vitrées. 1,9 million d'euros sont investis, les moyens mutualisés,
et un engagement fort des financeurs publics (Europe, Etat, Région,
Département, Municipalité) affiché. Début 2006,
la réfection est effective: 10 ans après. Est-ce le symptôme
de ce que son directeur nomme «la sortie d'une décennie de
paupérisation de l'art contemporain?»
Depuis le 21 janvier 2006: un nouveau panorama
Programmation, édition, site Internet ont été anticipés
afin qu'en 2006 le rythme reprenne assidûment. Aussi, après une
journée d'études (20.01.06) établie par l'Association
des Directeurs de Centre d'Art pour l'anniversaire des 20 ans des CAC en France,
le 21 janvier a inauguré un nouveau panorama. Débutant dans un
lien fort avec l'image en mouvement via le cinéma, ses modes
de production et de diffusion, la saison accueille une exposition ancrée
dans l'histoire locale, jusqu'au 7 mai 2006. Balayant 30 années, de «La
nouvelle vague», Jean-Luc Godard, etc. à aujourd'hui, «Cinéma(s)» réunit
films et documents, revisite l'époque de «Vidéogazette »,
MTK, Aäton (cf. J-P. Beauviala), et exhibe des créations d'artistes
(D. Gonzalez-Foerster, A. Leccia...). Est aussi dévoilée l'oeuvre
de Michael Craig Martin, «Changement de climat» (21.01-03.09.06).
Né en 1941, il étudie à Yale, s'installe en Grande-Bretagne
et devient un personnage clef de la 1ère génération d'artistes
conceptuels britanniques. Questionnant représentation et réalité,
il met en exergue la place de l'artiste comme créateur d'images, interpellant
leur réception. S'appropriant «la rue», il appose un wall-drawing (vinyle)
de 770 m2 créé par ordinateur et doté d'objets imaginés
par l'artiste, déclinés chromatiquement du magenta au bleu turquoise.
«L'Ecole du Magasin»
Seule formation professionnelle à l'échelle européenne
enseignant les pratiques curatoriales, L'école du Magasin (1987) prépare à devenir
commissaire d'exposition. Offrant une connaissance du réseau et une
inscription dans celui-ci, elle favorise l'acquisition d'outils dans le montage
d'expositions et les formalisent dans un projet final collectif.
Accessible en ligne
Depuis 2004, Le Magasin est «en ligne» avec une soixantaine d'oeuvres
d'artistes sollicités par Claude Closky, créateur du site.
Edition, librairie...
Courant janvier, une publication est apparue en lien avec les éditions JRP Ringier et Zurich. Retraçant l'histoire du lieu et vendue dans la librairie ultra-spécialisée du Magasin - située désormais au «magasin d'en face» - elle est dotée de textes critiques inédits.
A l'image des Kunsthalle, le Magasin fait partie de ces structures incontournables
pour découvrir l'art en gestation. Dans une région fortement
culturelle, il s'est rapidement démarqué par son ancrage dans
l'art le plus actuel, la monstration de la mise en jeu des moyens de production
ainsi que par sa mise en réseau à l'échelle européenne.
Etant donné son actualité récente, cet élément
fort du schème de diffusion artistique est désormais doté d'un équipement
opérationnel. Vu l'évolution urbaine alentour et pour y répondre
au mieux, un second chantier est pourtant prévu en 2007.
Hélène Lallier